FRANK MORZUCH - portrait d'artiste
Opportuniste. L'artiste travaille plus sur le paysage que sur le naturel : ce n'est pas tant les grandes étendues, les arbres, les forêts - chers aux autres artistes du Land Art - que le paysage qui l'entoure, s'offre à lui, qui l'intéresse. Ainsi d'une de ses œuvres, présentée à la Biennale des Arts Plastiques de Besançon cette année, qui naît d'un bout de moquette découpée pour épouser les formes d'une branche et loger un bataillon de petits cailloux blancs, illustrant bien cette attitude de Frank Morzuch.
Car c'est bien d'une attitude dont il s'agit. Franchement Contemporain a rencontré l'artiste dans sa maison de Faucogney, là-bas au pied des Vosges, cette maison qui, à chaque étage, met en scène des recoins façonnés, revisités par l'artiste. Du grenier au jardin, l'espace est questionné, construit, réapproprié. L'art est pour lui un travail quotidien, une quête permanente, dont l'objet importe finalement beaucoup moins que le chemin emprunté.
Pour Frank Morzuch, l'esthétique n'est pas suffisante. Dans son travail, s'opère une forme de processus d'investigation du paysage, qu'il soit réel ou figuré. Depuis de nombreuses années, il mène une recherche importante sur les tableaux de Dürer, recherche qui l'a rendu célèbre à travers plusieurs expositions et ouvrages s'y attenant.
L'artiste ne tarit pas sur le sujet. A travers l'étude des œuvres du maître allemand, il met le doigt sur de troublantes coïncidences, jusqu'alors inédites. Les lignes de construction tracées révèlent des perspectives, dessinent des pentagones, se croisent en des points mettant à jour des angles d'or et dévoilent ainsi une géométrie secrète de l'oeuvre.
Comme dans beaucoup de ses travaux, une sorte de jeu de pistes se met en œuvre, en interaction avec le spectateur, un indice se cachant derrière chaque découverte. Dans l'oeuvre de Dürer, le carré magique, interrogé par la réflexion mathématique, le questionnement des nombres, et la mise en regard avec l'astronomie, les planètes, offre des résonnances inattendues conduisant à de nouvelles interprétations. Qu'elles soient inspirées d'une œuvre d'art ou d'un paysage vosgien, ces réinterprétations revêtent, dans le travail artistique de Frank Morzuch, la forme d'une géographie émotionnelle, souvent empreinte de magie, d'énergie céleste, qui concentrent dans les œuvres la poésie des légendes habitant nos mémoires.
Frédérique FOULL
VESOUL & GRAY 10 & 13 novembre
Frank Morzuch sera l'invité des Amis du Cinéma de Vesoul, qui diffusent au Cinéma Majestic, le mardi 10 novembre à 20h15, le film-documentaire de Thomas Riedelsheimer "Rivers and Tides" sur l'artiste de Land Art, Andy Goldsworthy. Le film est également proposé au CinéMavia de Gray le 13 novembre.
Le film-documentaire "Rivers and Tides - Working with time" traduit "l'Oeuvre du temps", montre Andy Goldsworthy au travail. Habituellement vues en photos, ses œuvres fragiles et éphémères nécessitent souvent des heures de conception. Esthétiques, poétiques, elles sont "mises au monde" par l'artiste et mènent ensuite leur propre existence. Le temps, les marées, les saisons maîtrisent leur devenir. Le film témoigne du long, difficile et parfois frustrant apprentissage de la matière et des éléments dont fait preuve l'artiste.
Une chance de voir ce documentaire sur écran géant. A ne pas manquer.
Frédérique FOULL